C’est officiel : la campagne attire.

“Aujourd’hui, on assiste à un bouillonnement – accentué par la crise sanitaire – des mouvements migratoires dus aux démissions, aux licenciements, aux divorces, au télétravail… avec un mouvement fort de la ville vers la campagne.” Ainsi parlait le sociologue Jean Viard, à l’occasion de la rencontre “Innov’Rural : réinventer le travail pour vivre en rural” organisée par Cap rural le 04 septembre 2020. On assiste donc à une vraie “renaissance des campagnes” (pour copier le titre du livre du journaliste Vincent Grimault) : sur le plan démographique tout d’abord, beaucoup de territoires ruraux ont un solde migratoire positif (contrairement à Paris, par exemple, qui “perd” 12 000 habitants chaque année) ; mais aussi sur le plan socio-économique : les “néo-ruraux” amènent de nouveaux modes de travail (télétravail, espaces de coworking) mais aussi des envies de lieux de liens et de services de proximité (émergence des tiers-lieux).

Le Grenade fait le pari que son modèle résilient peut favoriser le milieu rural : pourquoi ?

Depuis 2010, nous avons créé et pérennisé plusieurs activités en territoire urbain : celles-ci ont permis à des personnes, pour la plupart âgés de moins de 30 ans, et en majorité demandeurs d’emplois (66%) ou bénéficiaires du RSA (15%), faisant face à une problématique de questionnement fort sur leur réorientation professionnelle, de créer des emplois, non pas par la création individuelle d’une entreprise, mais par le développement collectif d’un projet coopératif, géré démocratiquement à plusieurs, poursuivant des objectifs d’intérêt général et limitant statutairement la lucrativité (interdiction de distribution de dividendes).

Le constat que nous faisons, avec 10 ans de recul, est le suivant : la dimension collective et démocratique des projets est un facteur de résilience très important, comparé à des projets montés et gérés individuellement. Elle nécessite toutefois d’être très bien outillée (communication numérique, formation des équipes, techniques de prise de décision) et accompagnée (suivi de gestion, animation de séminaires). De plus, l’inscription dans une démarche de circuit court est, elle aussi, génératrice d’impact économique et social positif, avec le tissage de véritables relations de confiance, la naissance ou la confirmation de vocations nouvelles réciproques.

A l’initiative de certains de nos membres, nous faisons l’hypothèse que ce modèle innovant est aussi un vecteur de résilience en milieu rural.

Les difficultés auxquelles doivent faire face les porteurs de projet en zone rurale sont malheureusement beaucoup plus dures qu’ailleurs : difficultés en terme de mobilité et d’accessibilité, tant pour les porteurs de projet que pour les artisans et fournisseurs partenaires, faiblesse de la demande locale… et aussi, une forte carence de l’offre d’accompagnement à toutes les étapes, mais en particulier en phase de création. Sur ces aspects, les liens qu’a tissé le Grenade avec un partenaire tel que Villages Vivants sont précieux : dans le cas du projet de l’Auberge de Boffres, Villages Vivants s’est porté acquéreur du lieu et a financé une partie conséquente des travaux. Sans cet investissement de départ, le projet n’aurait peut-être pas vu le jour.

Un lien urbain-rural à repenser et travailler :

Cependant, les campagnes ne sont pas à opposer aux grandes métropoles et aux villes. Nous sommes convaincus que les unes ne peuvent vivre sans les autres et inversement. Jean Viard le confirme : “Les Métropoles sont encore aujourd’hui des locomotives puissantes en termes d’attractivité, de dynamisme et de développement économique.” Il nous faut penser la complémentarité de ces territoires, tisser des liens de coopération forts.

C’est tout l’intérêt selon nous du développement d’une brasserie telle que la SCOP La Machine, située à Saint-Laurent-en-Royans (26). Implantée dans une “zone de revitalisation rurale” (comprenez  : un territoire en perte de vitesse économique, sociale et démographique), la brasserie souhaite favoriser la création d’emplois locaux dans une entreprise pérenne, et par là recréer de l’attractivité dans ce territoire tout en l’engageant dans la transition écologique. Les liens privilégiés avec des bars de la Métropole tels que le Bieristan et le Court-Circuit seront certainement des atouts dans le développement de la brasserie et de son chiffre d’affaires.

Pour aller plus loin :